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La pâte à pain: Partie 2

Pétrir, une activité de l'ordre du tissage pour le voile de gluten, de la préservation des saveurs à cause de la volatilité des molécules aromatiques, qui nécessite une acuité visuelle et tactile pour tout ce qui concerne les derniers actes de bassinage, de temps, de vitesse pour obtenir une pâte aérée.
Façonner, le geste épuré, efficace, juste, pour profiter de tous les avantages et les mettre en valeur: un voile de gluten fin et fragile, une pâte aérée.
Diviser, signer le pain et envoyer au four, voilà les derniers gestes avant la cuisson, étape ultime.

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Pétrie à la main, au salon Eurogusto, à Tours

 

La pétrie: Les pétries très courtes de 4 minutes au maximum conservent les qualités propres à cette farine délicate. Les pétries intensives et longues donnent certes de la légèreté et de la blancheur aux pâtes mais elles altèrent par le contact de l'air (par phénomène d'oxydation) la quasi totalité des apports nutritionnels nobles du pain comme les minéraux, les composés volatils comme les carotenoïdes, les polyphenols et les acides aminés. Il existe des pétrins différents, certains à bras impressionnent par leur capacité à reproduire les gestes de l'homme en coupant la pâte et en la rassemblant, ce qui limite l'oxydation incriminée, technique de mélange en incorporant le moins possible d'air à la pâte… contrairement à un pétrin avec une queue de cochon. Certains boulangers, continuent de pétrir la pâte dans un pétrin en bois à la main, la production est alors limitée et physique mais cette démarche correspond à un mouvement de paysans-boulanger, limitant sciemment leur production, investis de façon fusionnelle dans la poursuite du bon pain.

 

Le pointage: Le pointage, c'est-à-dire la première fermentation des pâtes, est très long, environ 15 heures. Il est le moyen naturel incontournable pour révéler les arômes de la céréale; ce long pointage en masse permettrait aussi d'éliminer l'acide phytique, qui empêcherait l'assimilation d'autres minéraux, pas tout à fait établi cela dit.

 

Une anecdote? A propos de fermentation et pointage: la fermentation produit des arômes tertiaires de beurre et de vanille, mais cela produit aussi des croûtes plus épaisses, empêche la pâte de lever correctement, on dit que le pain ferre (la croûte se forme avant que le pain n'ait gonflé suffisamment), il se serre, la mie est compacte… ce temps doit être bien maîtrisé afin de ne pas tomber dans l'excès de fermentation. Il faut voir la fermentation comme un principe de dégradation... pour faire simple, les levures dégradent les sucres et produisent du gaz carbonique en mode aérobie (en présence d'oxygène), les bactéries en mode anaérobie produisent en fonction de leur type de l'acide lactique (acide perçu comme doux, yaourt) ou malique (acide perçu comme agressif, vinaigre). Ainsi, la fermentation est un piano naturel où la nature fait sa cuisine et l'on doit rester vigilant... le monde du vivant dégrade les sucres, mais aussi les glutens nécessaires à retenir le gaz de la fermentation et plus tard de la vapeur d'eau de la cuisson.

Donc un pain trop acide reste tout de même le signale d'un pain trop dégradé... il est intéressant de voir que la fermentation donne une impression de goût plus prononcé mais plus standard. Sur de la farine de blé ancien elle n'est pas ininteressante avec ses saveurs fortement épicé mais elle reste moins subtile... l'acidité, est comme le sucre un exhausseur de goût, inutile et standardisant.

 

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Les pâtons divisés à la paline

 

La division & le façonnage: Les ancêtres qui disposaient uniquement de blés de variétés anciennes et avaient acquis par l’expérience une certaine connaissance pratique que nous aurions tord de sous-estimer ; dès la sortie du pointage, la pâte fait l'objet d'une ou deux manipulations simples de rabat, pour lui donner du maintien, on parle de la force du pain. Un autre phénomène entre en jeu, les rabats ont le même rôle qu'un feuilletage, ils donnent de la hauteur, de quoi gonfler entre chaque feuillet. Plus on fait de feuillets et plus le mille feuille s'élève à la cuisson (à la cuisson la vapeur d'eau fait s'écarter les feuillets d'autant plus qu'ils sont fins et légers et plus il y a de feuillets et plus il y a d'ecart en nombre et donc de hauteur). Ensuite les divisions du pâton se succèdent sans brutalité avec une simple lame de bois. Le pain peut alors partir pour la deuxième fermentation appelée apprêt.

 

 

L'apprêt ultime étape de fermentation avant cuisson, la pâte divisée et dégazée va subir une dernière fermentation, et laissée ainsi elle va se recharger en gaz issu de cette fermentation.

 

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D'autres boulangers pratiquent le façonnage, ils boulent leur pâte, rondes, allongées ou assemblage de boules. Physiquement les chaînes de gluten se forment et s'ordonnent ainsi à la surface et le pain garde une belle forme à la cuisson.

 

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La grigne, un geste à faire juste avant la mise au four

La grigne: Le boulanger grigne afin de couper les chaînes de gluten et permettre ponctuellement  au pain de gonfler sans lutter contre les réseaux de gluten. La grigne se fait juste avant la cuisson, sinon la pâte se dégaze trop et le pain lève moins bien au four.

 

 

 

Annexe: un ami, boulanger conseil (parallèle à faire avec un oenologue conseil): la boulangerie par ses nombreux aspects techniques s'est muni de conseillers technologiques, choisir le temps de pétrie, oxygénation ou pas de la pâte pour obtenir une belle mie, type de cuisson pour obtenir une belle croûte, additifs éventuellement.

Mais si vous ne disposez pas d'une belle farine, votre pain même si technologiquement parlant sera bien fait, il n'aura pas ce charme, ni cette saveur, et sera évidemment moins digeste.

 

La suite,

la cuisson du pain

 

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